Internet des objets : quel modèle économique ?
Quels que soient les instituts ou entreprises qui s'y risquent, il est prévu à horizon 2020 - 2025 plusieurs dizaines de milliards d’objets connectés. Peu d’entreprises échapperont à cette révolution, aussi doivent-elles dès à présent penser à l’impact que l’IOT peut avoir sur leur modèle économique.
Là où les usages du M2M se limitaient essentiellement à optimiser des coûts opérationnels, les bénéfices attendus de l'IOT sont beaucoup plus larges et les impacts sur les modèles économiques existants, plus importants. Trois scénarios d’évolution sont envisageables pour une entreprise qui souhaite soutenir la valeur créée.
Les produits deviennent connectés et renforcent la valeur créée
Dans un premier scénario, l’entreprise fait évoluer son offre en proposant des produits connectés, voire intelligents à savoir des produits en mesure de prendre des décisions plus ou moins complexes en toute autonomie, améliorant ainsi sa proposition de valeur intrinsèque sans remettre en cause son modèle de revenus. L’entreprise va alors devoir développer de nouvelles capacités opérationnelles : recherche et développement, intégration de connectivité et d’intelligence, maîtrise et exploitation de données en volume, etc. Ces nouvelles capacités sont soit développées en interne soit « récupérées » auprès de partenaires clés. A titre d’exemple, une démarche d’open-innovation permet d’étendre les capacités de développement d’une entreprise au travers d’acteurs tiers. Philips a ainsi conçu une ampoule (hue) dont la luminosité et la couleur peuvent être contrôlées via une application sur Smartphone. Philips a laissé l'interface de contrôle ouverte à la création de plusieurs douzaines d'applications permettant de booster les ventes du produit.
Les données remontées permettent de personnaliser l’offre
Le deuxième scénario consiste pour l’entreprise qui propose ces nouveaux produits connectés, à aller plus loin et à transformer son modèle de revenus qui va désormais s’appuyer sur les informations remontées par les objets connectés développés. L’assureur Axa a ainsi lancé en avril dernier Axa Drive Coach, une application mobile qui aide le conducteur à « analyser, comprendre et améliorer son comportement et son style de conduite ». Axa a confirmé également le lancement, sous la forme d’un pilote, de son offre « maison connectée », qui regroupe un ensemble de services de prévention et d’alertes s’appuyant sur des objets connectés tels que des caméras de surveillance ou encore des détecteurs de fumée. L’enjeu pour Axa est ainsi de faire évoluer son modèle avec en cible la possibilité de proposer des tarifs de polices d’assurance adaptables à des risques individualisés.
L’entreprise rompt complètement son modèle et crée de la valeur au-delà de son cœur de métier
Enfin, dans un troisième scénario en totale rupture cette fois, la connectivité introduite dans les produits permet à l’entreprise de passer d’une logique de produit à une logique de services. L’entreprise, qui se dote, en interne ou externe, de toutes les capacités nécessaires à son nouveau « métier », remet à plat sa proposition de valeur initiale en se dotant d’un modèle du type « product as a service » (Paas). Michelin a entamé cette évolution : Michelin Solutions propose par exemple un service (Effifuel) permettant de piloter la consommation en essence de flottes de poids lourds en s’appuyant aujourd’hui sur des boîtiers télématiques et demain sur des pneus connectés.
Comment appréhender un tel changement de son modèle économique ?
Une telle évolution passe par la mise en œuvre une démarche d’innovation complexe notamment au vu de la multitude des possibilités et d’un écosystème plus riche jour après jour. Il nous paraît essentiel d’approcher le sujet avec l’objectif de construire, voire de co-construire, un écosystème et une constellation de valeur ouverts vers des tiers dans une logique d’open-innovation. De plus, il sera difficile de réussir un tel changement du premier coup, une approche itérative basée sur l'apprentissage et l'expérimentation sera plus efficace que des approches analytiques classiques, avec pour objectif d’essayer pour apprendre en sachant rapidement arrêter les projets qui s’avèrent décevants Il s'agit en particulier de commencer petit et de se focaliser sur un sujet avec un fort impact en communication. Il sera également nécessaire de mettre en place une veille, notamment technologique autour des capteurs et des réseaux de communications car les innovations sont de plus en plus rapides dans ce domaine. Les contraintes de sécurité et de protection des données personnelles des utilisateurs doivent être prises en compte dès le début d’une telle réflexion. Enfin, un travail hors processus, au moins dans un premier temps, et une implication des équipes métier seront nécessaires pour lancer cette dynamique.